Les programmes « Vivre avec la Drépanocytose » et « Educ’Santé Junior »

Publié le : 24 mars 2022

De gauche à droite : Lucie Thibault et Janaine Lony et , coordinatrices des programmes « EduSanté Junior » et « Vivre avec la Drépanocytose ».

Premier d’une série de portraits des acteurs et actrices de l’éducation thérapeutique des patients (ETP) en Guyane, GPS vous propose ce mois-ci de rencontrer Janaine Lony et Lucie Thibault, coordinatrices des programmes « Vivre avec la Drépanocytose » et « Educ’Santé Junior » déployés à l’initiative du Pr Narcisse Elenga, chef du pôle pédiatrie du CH de Cayenne.

Pouvez-vous nous expliquer pourquoi ces deux programmes existent ?

Janaine Lony, programme « Vivre avec la Drépanocytose » :

L’ETP a été mise en place en janvier 2020 au Centre Intégré de Drépanocytose – CID – afin que les patients puissent adapter leur quotidien avec la maladie et améliorer leur qualité de vie. Première maladie génétique au monde, la drépanocytose touche fortement la Guyane avec plus de 10% de la population qui sont porteurs du gène, on dit qu’ils sont hétérozygotes. On estime que 2000 personnes sont suivies en Guyane, dont presque 700 au CID. Il existe une grande méconnaissance de cette maladie chronique très difficile au quotidien, et de son impact sur les patients, les familles et la population en général.

Lucie Thibault, programme « Educ’Santé Junior » :

Le parcours de vie parents-enfants-jeunes est une priorité régionale. Un enfant vivant avec une pathologie chronique a besoin d’une prise en soins continue qui entraîne des répercussions dans le domaine scolaire pour lui, et dans le domaine professionnel pour les parents. Ces situations peuvent accroitre l’isolement et la précarité socioprofessionnelle et financière des familles.

C’est pourquoi au centre hospitalier de Cayenne, où la pédiatrie occupe une place de choix, nous avons décidé de promouvoir un programme ETP destiné aux enfants et adolescents vivant avec une maladie chronique, ainsi qu’à leurs familles. Ce programme concerne deux aspects majeurs de la prise en soins en pédiatrie : Une « branche » nutrition concernant l’obésité, le surpoids infantile, et les diabètes de type 1 et 2, et une « branche » respiratoire avec l’asthme et les allergies.

Quels sont les objectifs et les enjeux des programmes ?

JL : Le programme permet aux patients d’acquérir des connaissances sur leur maladie, leurs traitements et les différents examens effectués, mais surtout de développer des « compétences patient ».

L’ETP permet aussi aux parents d’enfants drépanocytaires récemment diagnostiqués d’être mieux accompagnés, mieux informés. Le programme inclut aussi une sensibilisation des différents acteurs qui côtoient des personnes drépanocytaires comme les enseignants, les camarades de classe, l’entourage etc.

LT : En pédiatrie, enfant-patient et famille sont au cœur du parcours. Il doit se créer une relation de soins tripartite, patient-proche-professionnel de santé, au sein d’un environnement et avec un niveau d’autonomie en perpétuelle évolution. Le programme permet l’acquisition et l’accompagnement dans le temps, de l’autonomie familiale, de l’adaptation à la maladie et de la réalisation de projets de vie. Il s’agit de collaborer en vue d’une amélioration de la santé du patient et surtout de sa qualité de vie. Là aussi, on retrouve la finalité spécifique de l’ETP qui est l’accompagnement au développement de compétences par l’enfant et sa famille.

En ETP le patient et sa famille développent :

  • des compétences d’auto-soins pour mieux gérer les crises douloureuses et les traitements, repérer les situations d’urgence et savoir réagir pour prévenir les complications sévères, adapter ses comportements pour vivre une grossesse dans de bonnes conditions …
  • des compétences d’adaptation afin de concilier les projets de vie avec la maladie, de gérer leur stress…

Quelle est votre démarche avec les patients, et comment travaillez-vous en intégrant les autres professionnels ou proches qui interviennent dans le parcours des patients ?

JL : Le Centre Intégré de Drépanocytose est un service qui accompagne les patients drépanocytaires de l’enfance à l’âge adulte pour des soins ambulatoires. Toute personne drépanocytaire reçue par les autres services du CHC est systématiquement dirigée vers le CID et l’ETP, ou font appel à l’équipe pour intervenir en cours d’hospitalisation par exemple auprès des patients venant des centres de santé de Papaïchton et Maripasoula. Nous communiquons sur le programme auprès des acteurs du secteur de ville (libéraux, PMI..), notamment le médecin traitant des patients. Nous travaillons également en collaboration avec des associations comme DrépaGuyane qui assure une permanence quotidienne au CID et propose des actions pour les patients.

LT : L’ETP utilise une approche biopsychosociale et favorise une participation active du patient et de son entourage dans le processus de soin et de suivi de la maladie. Le programme est « pluripathologique » et animé par une équipe pluriprofessionnelle. Il offre une palette d’activités permettant la personnalisation de l’ETP en fonction des besoins particuliers de chaque patient. Nous interagissons évidemment avec les équipes de soins des services d’hospitalisation mais aussi avec les institutrices en poste au CHC.

En extra-hospitalier, l’objectif est à court terme de créer des partenariats avec les médecins traitants, associations de patients, infirmiers libéraux et établissements solaires.

La coordinatrice est l’interlocutrice privilégiée et la cheffe d’orchestre à l’écoute des membres de l’équipe et des familles.

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Pouvez-vous nous présenter un bilan de ce que vous avez mis en œuvre jusqu’à présent ?

JL : Depuis 2 ans, nous avons suivi plus de 220 patients, adultes et enfants. Avec la pandémie nous avons essentiellement proposé des séances individuelles y compris en hospitalisation. Avec les membres de l’association DrépaGuyane nous avons proposé des séances d’information et de sensibilisation dans des écoles et collèges, réalisé des vidéos, des actions de dépistages, afin d’informer et sensibiliser le grand public. Nous avons pu bénéficier de dons de thermomètres et d’appareils Respiflo qui permettront aux patients de mieux détecter certaines complications de façon plus précoce.

LT : L’éducation du patient comme un droit a été prévue par la loi Hôpital, Patient, Santé, Territoire (HPST) de 2009. Elle est complémentaire de la prise en charge médicale classique et doit être réalisée en équipe pluridisciplinaire formée. Le patient et les soignants s’engagent réciproquement dans cette démarche.

L’éducation thérapeutique en pédiatrie au CHC s’est développée en premier lieu au sein de l’hôpital de jour pédiatrique en 2005 avec la création de l’association « Educ’Santé Junior ». Au départ centré sur le surpoids et l’obésité infantile, le programme est devenu pluri-pathologique et reconnu par l’ARS en 2011.

En 2020, avec le soutien de la direction et du Pr Elenga, nous avons décidé de revoir tout le programme et de créer une activité d’ETP pédiatrique pérenne, avec du personnel dédié. Nous avons reçu l’agrément de l’ARS en octobre 2021.

Qu’est-ce qui vous parait important de développer dans un futur proche ?

JL : Nous avons ciblé de nouveaux besoins, comme l’amélioration de la détection et de l’accompagnement des patients présentant une addiction aux antalgiques opiacés. Nous essaierons cette année de proposer des séances collectives de renforcement des compétences psychosociales avec la présence de professionnels comme des psychologues, et des patients ressources. Nous continuerons à faire des campagnes d’information sur la maladie avec l’association afin de mieux faire connaitre la Drépanocytose et son impact en Guyane.

LT : Nous avons pour projet de développer les ateliers collectifs, de renforcer notre prise en charge post-annonce et de créer un vrai lieu d’écoute et d’accompagnement pour les patients. Nous souhaitons également développer un partenariat avec l’équipe ETP-diabète adulte pour accompagner le passage d’une prise en soins pédiatrique vers le service adulte. De même, nous réfléchissons à la manière d’améliorer la coordination avec les partenaires extra-hospitaliers et dans les communes. Enfin, dans le contexte actuel, nous essayons de développer l’e-ETP, qui pourra être utile en tout temps pour les patients vivant dans les communes isolées.

Quelles sont vos interactions avec GPS ?

JL : Guyane Promo Santé nous accompagne dans les différentes étapes de la mise en place du programme. La chargée de projet nous guide et nous aide à mettre en place un programme cohérent et pertinent qui répond au mieux aux besoins des patients. La plateforme nous propose également de nous former continuellement afin que l’on puisse acquérir plus de compétences et proposer une éducation thérapeutique de qualité.

LT : Un précieux soutien tout au long de l’élaboration du programme que ce soit dans l’aide à la rédaction du dossier ARS, à la création d’ateliers et d’outils ou de la formation.

Témoignages de patients

 

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