Organisé par Guyane Promo Santé, les Ateliers de la Recherche proposent à des act·eurs·rices professionnel·le·s de tous horizons de présenter leurs expériences de terrain et leurs recherches autour d’une même thématique ayant trait à la promotion de la santé, l’objectif étant de faire connaître les actions de chacun·e et de faciliter les synergies entre act·eurs·rices.
Le mercredi 19 juin 2024, l’Atelier de la Recherche #8 sur la Qualité de l’eau consommée en Guyane était proposé à une cinquantaine de participant·e·s.
L’enjeu annoncé était de définir ce qu’est l’eau potable et comment accéder à une eau de bonne qualité pour les usages du quotidien…
Pour en parler étaient invité·e·s : Alexandra AYMARD, Ingénieure Grand Cycle de l’Eau et Julie PILOSU, Ingénieure Eau et Assainissement, toutes deux pour l’Office de l’eau de Guyane, Adrien ORTELLI, Chef de service Santé-Environnement à l’Agence Régionale de Santé de Guyane, Priscilla THÉBAUX, Docteure en anthropologie de l’eau et Margot OBERLIS, Responsable projet Équipe Mobile Santé Environnement de la Croix Rouge Française en Guyane.
Lors de l’introduction de cet atelier, Raphael TOLVE, directeur de Guyane Promo Santé et Marc Alexandre TAREAU, membre du Conseil d’Administration du GRAINE Guyane ont rappelé à quel point la santé et l’environnement sont étroitement liés.
Cette interdépendance entre la santé et l’environnement justifie pleinement le rapprochement entre nos deux têtes de réseau, rapprochement qui s’inscrit dorénavant dans le cadre du nouveau PRSE (Plan Régional Santé Environnement) 2024-28).
Le but est de donner aux act·eurs·rices des repères et des moyens d’agir en éducation et promotion de la santé environnement : cela passera par la mise en œuvre à venir d’espaces d’acculturation et d’apprentissage et l’organisation de nouvelles ressources, à l’image de cet atelier qui inaugurait cette démarche.
Le GRAINE Guyane et GPS travailleront donc dorénavant plus régulièrement ensemble pour contribuer à créer une culture Santé Environnement commune, basée sur les principes de l’approche One Health.
Pour démarrer cet atelier sur l’eau, Alexandra AYMARD nous a rappelé les missions de l’Office de l’eau, chargé d’œuvrer dans le domaine de la gestion de l’eau et la préservation des milieux aquatiques. Elle nous a présenté les caractéristiques du réseau hydrographique guyanais et, à travers son activité au sein du Réseau de surveillance de la ressource, elle a abordé la qualité de l’eau sur le plan biologique et chimique des différents milieux naturels soumis à de multiples pressions anthropiques. Elle a restitué une partie des données qualité de l’eau issue de l’application de la Directive-cadre européenne sur l’eau en Guyane.
Après cette introduction sur le grand cycle de l’eau, Julie PILOSU (Office de l’eau) a exposé les pressions domestiques qui pèsent sur la qualité de l’eau, notamment à travers un focus sur l’assainissement collectif et non collectif, véritable enjeu environnemental et sanitaire sur l’ensemble de la région et encore plus sur les secteurs densément urbanisés.
Elle a également présenté des chiffres clés sur le petit cycle de l’eau et une vue d’ensemble sur le rôle et la diversité des autorités compétentes dans l’approvisionnement en eau potable et l’épuration de l’eau.
Dans la foulée, Adrien ORTELLI de l’ARS dont l’une des principales compétences du Pôle Santé Environnement qu’il dirige est la prévention et la gestion des risques pour la santé humaine liés à l’eau (protection de la ressource en eau, alimentation en eau potable, eaux de baignade, etc.) nous a rappelé que la qualité de l’eau potable (dont la responsabilité du traitement et de la distribution incombe aux collectivités compétentes) doit être conforme aux normes les plus strictes du droit français.
Il nous a confirmé que cette eau destinée à la consommation humaine est globalement de bonne qualité, avec cependant des disparités régionales et a souligné qu’une forte proportion de la population guyanaise n’a pas accès à l’eau du robinet, et est donc plus vulnérable aux maladies hydriques.
Ensuite, Priscilla THÉBAUX (qui a soutenu une thèse d’anthropologie en décembre 2023 dont l’objet était d’interroger les transformations en cours des manières d’accéder à l’eau des habitant·e·s de Saint-Georges de l’Oyapock) nous a parlé des pratiques et des représentations qu’ont les habitant·e·s de ce territoire de l’Est Guyanais et plus particulièrement de la manière très concrète et de la grande diversité sur le plan “pratique et technique” dont ces usager·e·s s’approvisionnent en eau dans leur milieu et en définissent la potabilité selon leurs propres critères.
Pour terminer, Margot OBERLIS (Croix Rouge Française) nous a fait part des résultats du premier volet d’un projet de recherche-action mené en 2023 au sein de plusieurs quartiers d’habitat spontané de Cayenne et ses environs auprès de personnes qui n’ont pas d’accès direct à l’eau potable ou utilisant d’autres dispositifs d’accès à l’eau hors service public.
Cette étude visait à réaliser un état des lieux des connaissances, des attitudes et des pratiques de ces habitant·e·s sur l’accès à l’eau, les maladies liées à l’eau, l’hygiène, l’assainissement et à identifier les stratégies d’adaptation mises en place par ces habitant·e·s pour accéder à de l’eau (potable ou non).
De ces constats préoccupants a découlé un projet en promotion de la santé qui a pour objectif d’accompagner les habitant·e·s à traiter l’eau à domicile, en partant de leurs connaissances, de leurs pratiques et de leurs moyens. Cette approche de réduction des risques sera déployée prochainement par l’équipe de médiat·eurs·rices en santé qui composent l’équipe.
À la fin de ces interventions, une discussion générale et des échanges avec les participant·e·s ont été lancés.
Les échanges au cours de cet atelier ont remis en évidence que l’accès à de l’eau, destinée à la consommation et à un usage domestique, reste un enjeu majeur pour la Guyane tant au niveau de l’amélioration des processus d’approvisionnement et d’assainissement que de la meilleure gestion possible de la ressource en eau.
Le traitement de cet enjeu peut se faire par l’aménagement d’infrastructures (captages, réseaux, bornes fontaines), mais également par l’accompagnement des populations « non connectées » dans leurs pratiques individuelles pour diminuer leur vulnérabilité face aux maladies hydriques.
Enfin, cet atelier a démontré que la mise en commun des savoirs, expériences et expertises est un préalable à l’émergence de synergies en vue de préserver et améliorer l’état de santé des populations et protéger l’environnement.
Les presentations des intervenant.e.s :
Docteure en anthropologie de l’eau – Priscilia THEBAUX
Croix Rouge Française – Margot OBERLIS