Vouloir une société en bonne santé nécessite d’agir conjointement dans de multiples domaines, qu’il s’agisse des transports, de l’habitat ou de la cohésion sociale, et de construire des réponses avec les acteurs et les habitants du territoire.
L’objectif du Réseau français des Villes-Santé de l’OMS est de susciter une prise de conscience, de stimuler le débat en s’appuyant sur des informations fiables, et surtout d’inciter à agir en santé à travers toutes les politiques publiques et à tous les échelons du territoire.
Une vingtaine de maires de grandes villes du réseau français des villes-santé de l’OMS ont demandé dans une tribune du JDD du 17 février dernier, des moyens pour agir localement contre les inégalités sociales de mortalité et de santé.
« La France fait partie des pays où les inégalités sociales de mortalité et de santé sont les plus élevées en Europe occidentale et celles-ci n’ont aucune tendance à régresser ces dernières années ». Le constat dressé ces dernières années par les instances de l’État (Haut Conseil de la Santé Publique (2009), Direction de la recherche, des études et de la statistique (2017), Santé Publique France (2018), est en complète incohérence avec la devise d’égalité de notre République. Ainsi un homme de 35 ans, s’il est ouvrier, a une espérance de vie inférieure de 6,4 ans à celle d’un cadre. Comment pouvons-nous continuer à accepter que le niveau de santé, et donc de bien-être, et l’espérance de vie diffèrent en fonction de l‘origine sociale de nos concitoyen.ne.s ?
Ces inégalités commencent dès la conception et les premiers instants de la vie, durant la période des 1000 premiers jours. La France est particulièrement mal placée en la matière, où les disparités sont majeures dès la période pré-natale. Ainsi, les risques de prématurité, de grande prématurité ou de petits poids de naissance peuvent aller du simple au double en fonction de l’emploi occupé ou du niveau d’éducation. En matière bucco- dentaire, moins de 2% des enfants de cadres ont au moins deux dents cariées non soignées, contre 11% des enfants d’ouvriers.
Comme le souligne l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS), la lutte contre la constitution de ces inégalités est largement multifactorielle et conditionnée par l’environnement de vie au sens large, qu’il soit physique ou social. Nous ne pouvons que nous réjouir de la signature de la Stratégie Nationale de Santé interministérielle 2018-2022 qui prend en compte cette approche de la santé dans toutes les politiques. Pour autant, il est nécessaire de rappeler que les leviers pour agir sont largement locaux. La transversalité voulue par la Stratégie est au cœur de la philosophie des Villes-Santé depuis leur création. Les collectivités locales œuvrent, au quotidien, à la constitution d’environnements de vie de qualité pour les individus qui y naissent et y grandissent.
Les inégalités sociales de santé en France ne pourront pas diminuer sans l’association active et continue des collectivités locales.
Pour cela trois axes sont prioritaires pour les Réseau français des Villes-Santé de l’OMS et qui ne peuvent être traités sans le concours et l’implication des services de l’Etat :
- Mesurer les inégalités sociales de santé sur les territoires : il n’existe pas d’informations accessibles suffisamment précises pour caractériser les inégalités subies par les habitants, et en particulier les enfants, à un niveau infra-communal.
- Décloisonner les interventions : De nombreuses institutions agissent au profit des enfants et, à ce titre, occupent une position centrale dans la lutte contre les inégalités sociales de santé. L’Education Nationale est au premier rang de ces institutions et il est indispensable que des collaborations plus efficaces puissent exister avec les acteurs locaux, et notamment les municipalités. Un chantier a été ouvert autour d’un parcours santé-accueil-éducation 0-6 ans et il se doit de réussir à relever ce défi. Nous y prenons toute notre part.
- Former les professionnels : La compréhension des mécanismes par lesquels se constituent ces inégalités de santé et des moyens de lutte contre celles-ci doit faire partie de la formation des professionnels au contact des enfants, notamment dans les secteurs de l’accueil, de l’éducation et du soin. En effet, en classe de CM2, le taux d’obésité est multiplié par 10 entre enfants de cadres et d’ouvriers. Les facteurs sont multiples et ne peuvent en aucun cas être réduits aux injonctions de “Manger Bouger”. Agir ensemble, en lien avec les acteurs politiques, institutionnels et académiques à tous les échelons, est la clé qui nous permettra de répondre à cet enjeu majeur. Nous demandons la mise en place de moyens pour agir localement, de façon coordonnée et dans le respect de l’équité des territoires. Il en va de la promesse d’égalité de notre République.
Maires signataires de la tribune
Nathalie Appéré, Maire de RENNES
Christophe Béchu, Maire d’ANGERS
Alain Bocquet, Maire de SAINT-AMAND-LES-EAUX
Joël Bruneau, Maire de CAEN
Olivier Carré, Maire d’ORLEANS
Gérard Collomb, Maire de LYON
François Cuillandre, Maire de BREST
Jean-François Debat, Maire de BOURG-EN-BRESSE
Brigitte Fouré, Maire d’AMIENS
Jean-Louis Fousseret, Maire de BESANCON
Jean-Claude Gaudin, Maire de MARSEILLE
Anne Hidalgo, Maire de PARIS
Alain Juppé, Maire de BORDEAUX et Président de Bordeaux Métropole
Michèle Lutz, Maire de MULHOUSE
Roland Ries, Maire de STRASBOURG
Johanna Rolland, Maire de NANTES
Danielle Valéro, Maire déléguée d’EVRY
Article de la Fédération Nationale d’Education et Promotion de la Santé (FNES)